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Découvrons les insectes du bord des chemins de l’eau (2)

Les papillons diurnes
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Publié le 3 juillet 2015 , par BOCHATON Jacques dans Flore et faune

Quand on a eu la chance de vivre sa jeunesse à la campagne, on se rappelle les grandes vacances et ses belles journées estivales. Muni d’un filet à papillon, le regard scrutant les fleurs des prés à la recherche du moindre battement d’aile, on se mettait à courir jusqu’à perdre haleine dès que l’on avait repéré l’un de ces insectes voltigeurs. L’écologie n’existant pas et la population des lépidoptères étant abondante, on se plaisait à les collectionner. Aujourd’hui, il n’est plus question de les épingler et de les fixer dans des boîtes, laissant cette activité aux savants entomologistes.
Et puis, la capture numérique a changé la donne. Les photographies sitôt prises s’affichent à l’écran et d’un clic les papillons s’envolent dans le monde entier pour le plaisir des yeux de tous les internautes.


Cet article est la suite de Découvrons les insectes du bord des chemins de l’eau (1).

Je vous présente les papillons tel que je les découvre au fil des saisons. Vous connaissez la plupart d’entre eux. Quelques-uns se rencontrent plus rarement et bénéficient à ce titre d’une protection juridique (qui reste hélas bien souvent théorique). Une fois encore, il est regrettable de constater que certaines activités humaines causent des dommages graves à ces populations. Les papillons ne sont pas seulement des êtres beaux à observer mais ils assurent des fonctions très importantes dans les écosystèmes notamment pollinisatrices. Les réseaux trophiques   ne peuvent fonctionner sans eux. Protégeons-les.

Le terme « lépidoptère » tire son origine des mots grecs : « Lepidos » = écaille et « pteron » = aile. En effet, si l’on observe à la loupe les ailes de ces individus on découvre de petites écailles placées à la manière des tuiles de toiture qui recouvrent une surface membraneuse. De plus, bien souvent ces écailles de nature chitineuse   sont pigmentées de couleurs variées caractéristiques de l’espèce.

Crédits: Jacques Bochaton
Disposition des écailles de papillon et leur pigmentation.

 

Rappel : cliquez sur les images de ce site pour les agrandir. 

Crédits: Jacques Bochaton
Papillons - Tableau 1

1. Les papillons diurnes (=rhopalocères)
qui apparaissent au printemps : le soleil revient, les journées s’allongent, la terre se réchauffe. Les papillons printaniers sortent de leur hibernation et de leur abri de fortune.

Le Citron ou Gonepteryx rhamni éclaire du jaune-vif de ses ailes le ciel de mars souvent bien gris. Parfois même, il survole des congères encore présentes dans les bas côtés des chemins.
Les ailes de la femelle sont d’un jaune-vert pâle. Après l’accouplement, celle-ci pond plusieurs dizaines d’oeufs. Tandis que les chenilles se nourrissent abondamment de feuilles de nerprun, les imagos   entrent rapidement en léthargie pour ne retrouver une activité que durant l’automne. Dès que le soleil décline, ils se préparent un abri pour hiberner jusqu’en mars. Les plus chanceux résistent aux frimas.
Le Citron tient chez nous le record de longévité. Le mot « Gonepteryx » vient du grec « gônia » = angle et « pteron » = aile soit : a le bord des ailes anguleux. « rhamni » de « rhamnos » désigne le nerprun.

La Petite Tortue, Vanesse de l’ortie ou Aglais urticae : elle se réveille dès le mois de février et vient frapper de ses ailes à l’une de vos fenêtres de garage où elle a passé l’hiver. Dès l’ouverture, elle s’envole et recherche les premières fleurs : Tussilage-pas-d’âne, Ficaire, Anémone pulsatile, chatons de Saules... puis arrive rapidement la période de reproduction.
Après l’accouplement, la femelle choisit la « Grande Ortie » (« Urtica dioica ») pour y déposer ses œufs. En effet, les chenilles raffolent de ces feuilles. Une autre génération apparaît avant l’automne et entre en léthargie dès l’arrivée de la mauvaise saison.
L’origine du choix de « Vanesse » ou plutôt « Vanessa » a fait couler beaucoup d’encre. De nombreuses hypothèses ont été avancées. L’une des plus probables s’appuie sur la méthode de classement de son auteur Johan Christian Fabricius (1745 – 1808). Tout comme Carl Von Linné, il puisait ses zoonymes dans la mythologie gréco-romaine et Vénus, la déesse de l’Amour, lui aurait inspiré ce nom. Le mot « Tortue » fait référence au Tartare , lieu infernal des Grecs et des Romains. Quant à « Aglais » il désigne l’une des trois Grâces.

L’Aurore ou Anthocaris cardamines  : lorsque la Cardamine des prés tache de violet les lisières des bois ou les prairies humides, l’Aurore donne le signal des réjouissances.
Le mâle se reconnaît facilement par une bande orange disposée sur ses ailes supérieures blanches, signal visuel que la femelle ne possède pas. Au revers, les ailes présentent des nervures et taches de couleur jaune-verdâtre.
La reproduction a lieu au mois de juin. Les œufs sont pondus sur ces plantes hôtes. Quelques jours plus tard, des petites chenilles vert clair apparaissent et commencent à se nourrir avec avidité. Après plusieurs mues successives, elles se transforment en chrysalides de forme triangulaire. Ce stade de la nymphose   s’étend de l’automne au printemps suivant.
La mythologie grecque nous apprend que la déesse éponyme fut amoureuse de Céphale. Mais celui-ci n’aimait que son épouse Procris. Aurore, jalouse, offrit à son amant un javelot. Céphale, chasseur passionné, croyant voir une biche dans un buisson lança le javelot qui tua sa bien aimée.

Le Céphale ou Coenonympha arcania : Linné (1707-1778) puisa dans la mythologie gréco-romaine de nombreux noms pour classer insectes et plantes. Il choisit tel ou tel nom pour tel ou tel individu selon des critères de couleur, de forme, de mœurs... mais bien souvent il appliqua la loi du hasard. Ainsi pour ce papillon, les mots issus du Grec : « Képhalé » = tête, « Coenonympha » de « Koïnos » = communauté et « numphé » = nymphe, « Arcania » = nom de l’une des cinquante Danaïdes, ne semblent pas se rapporter à une caractéristique particulière de l’individu. Toutefois les références à la mythologie antique semblent plus poétiques que de simples attributs alpha-numériques. On retrouve la même démarche dans le classement des corps célestes. Ainsi Céphale reçut d’Aurore un chien tellement rapide à la course que Zeus le métamorphosa en une constellation, celle du « Grand Chien ». Même si la galaxie NGC 2841 émerveille notre regard, sa dénomination moderne n’évoque rien.

La Belle Dame, Vanesse du chardon ou Vanessa cardui, Cynthia cardui : « cardui » désigne le chardon, la plante hôte de sa chenille. « Cynthia » vient de « Kynthos », lieu où naquit Diane.
Ce beau papillon traverse durant le mois de mars la mer méditerranée et se reproduit dans le sud de la France. Une nouvelle génération arrive au Pays de Langres en mai, celle automnale migre vers l’Afrique. Ce papillon n’est pas farouche. Il semble au contraire très espiègle et désire jouer avec vous. Il vous devance de quelques mètres puis vous attend posé sur le chemin, ailes déployées. Lorsque vous arrivez à sa hauteur, il repart quelques mètres plus loin. Mais dès qu’il se décide à vous quitter il disparaît en un clin d’oeil.

Le Paon de jour, l’Oeil de Paon ou Inachis io : Ses ocelles   colorés évoquent ceux de l’oiseau mâle, attribut de la déesse Héra. « Inachis » fait référence à « Inachos », le premier roi des Argiens, fils d’Océan et de Téthys. Il eut de nombeux enfants dont la belle Io. Zeus en personne s’éprit de la jeune fille ce qui ne fut pas du goût de son épouse. Elle la métamorphosa en une génisse et l’attacha à un olivier. Délivrée par Hermès, elle fut harcelée par un taon envoyé par Héra. Dans sa course folle elle traversa de nombreux pays pour arriver finalement en Egypte où elle reprit forme humaine. Elle donna naissance au fils de Zeus : Epaphos.
Ce papillon sort de sa léthargie au début du printemps et s’empresse de se réchauffer sur les pierres ensoleillées des chemins. Il voltige un peu partout dans notre campagne à la recherche de fleurs diverses. Les chenilles préfèrent les feuilles d’orties et de ronces.

Robert-le-Diable, le Gamma ou Polygonia c-album : Le nom « Robert-le-Diable » se réfère à un personnage cruel plus ou moins légendaire du Moyen Age considéré comme l’incarnation du diable. La couleur brun-rougeâtre des ailes de ce papillon suggère les flammes de l’enfer. D’autre part, le mot « Robert » rappelle les antiques fêtes païennes, les Robigales, durant lesquelles les agriculteurs romains invoquaient une divinité bisexuée : Robigus-Robigo. Cette divinité protégeait les céréales de la rouille ou nielle et ils lui sacrifiaient un chien de couleur rouille. Plus tard, la fête chrétienne des Rogations reprit le thème de la protection des moissons.
Ce papillon aux ailes échancrées (d’où le mot « polygonia ») hiberne et à l’instar de la Petite Tortue ou du Paon de jour se réveille dans les remises, réchauffé par le soleil printanier. Sur le revers de ses ailes supérieures apparaît une tache blanche (d’où le qualificatif « album ») en forme de « C ». Pour d’autres entomologistes, il s’agirait plutôt du « G » grec à l’origine du nom « Gamma ».
Vous le trouverez le long des ruisseaux, des berges du canal, des quatre lacs ou en lisière des bois. Les chenilles privilégient les orties.

Le Demi-Deuil, le papillon-Echiquier, le papillon-Damier ou Melanargia galathea : « Melanargia » résulte de la contraction de deux mots grecs « Melan » = noir et « argos » = blanc. Ces deux couleurs s’alternent sur ses quatre ailes. « Galathea » = est une Néréide.
« Demi-Deuil » fait allusion à la coutume du deuil qui consistait à porter des vêtements noirs et blancs. Les ailes de la femelle tirent sur le beige. Vous rencontrez ce papillon dès le mois de mai dans les prairies riches en graminées et aussi sur les fleurs du Cirse commun (Cirsium vulgare). Il partage le même festin avec la Zygène de la filipendule (Zygaena filipendulae).
Les femelles déposent leurs œufs sur les feuilles du saule ou du bouleau. Les petites chenilles de couleur verte rayées de jaune passent l’hiver à l’abri dans le sol et entrent à nouveau en activité dès que les prémices du printemps apparaissent.

A suivre : Découvrons les insectes du bord des chemins de l’eau (3)

Dans le glossaire :
Réseaux trophiques   Nature chitineuse   Imagos   Nymphose   Ocelles   potentiel hydrogène chaînes alimentaires

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